Le Pacte de Marrakech décortiqué
Les 10 et 11 Décembre 2018, plus de 150 États réunis à Marrakech ont adopté un "Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières"
Les 10 et 11 Décembre 2018, plus de 150 États réunis à Marrakech ont adopté un « Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières ».
Deux critiques ont émergé à son sujet. Il priverait les États de leur souveraineté et de leur liberté d’action sur le sujet ; pire il obligerait les signataires à accueillir un nombre déterminé de migrants.
Les deux sont fausses.
La souveraineté. L’argument a fait fureur auprès des souverainistes du Monde. Le Pacte transfèrerait une part de souveraineté des États vers l’ONU sur la question migratoire.
Mais que dit le texte ?
« 7. Le présent Pacte mondial établit un cadre de coopération juridiquement non contraignant, qui repose sur les engagements convenus par les États Membres dans la Déclaration de New York pour les réfugiés et les migrants. Il favorise la coopération internationale en matière de migration entre tous les acteurs compétents, sachant qu’aucun État ne peut gérer seul la question des migrations, et respecte la souveraineté des États et les obligations que leur fait le droit international. » Page 3.
Deux pages plus loin on trouve ceci :
« c) Souveraineté nationale. Le Pacte mondial réaffirme le droit souverain des États de définir leurs politiques migratoires nationales et leur droit de gérer les migrations relevant de leur compétence, dans le respect du droit international. »
Le droit souverain des États à définir leur politique migratoire et à les gérer est donc affirmé à plusieurs reprises. Pas de transfert de compétence, donc.
Des objectifs chiffrés ?
Selon plusieurs publications , le pacte fixerait, pour chaque pays, des objectifs chiffrés d’accueil de migrants, avec une date butoir. Rien de tout cela dans le texte. Aucune répartition chiffrée n’y est trouvable.
Des médias muselés ?
Marine Le Pen, Nicolas Dupont-Aignant et certains gilets jaunes affirment que le texte obligerait les médias à ne dire que du bien des migrants, sous peine de sanctions financières.
Le texte dit ceci : « c) Promouvoir une information indépendante, objective et de qualité, y compris sur Internet, notamment en sensibilisant les professionnels des médias aux questions de migration et à la terminologie afférente, en instituant des normes déontologiques pour le journalisme et la publicité et en cessant d’allouer des fonds publics ou d’apporter un soutien matériel aux médias qui propagent systématiquement l’intolérance, la xénophobie, le racisme et les autres formes de discrimination envers les migrants, dans le plein respect de la liberté de la presse ; »
Il s’agit donc de lutter contre les propos racistes et xénophobes, non d’instituer une sorte de « police de la pensée. La loi française punit déjà ces propos. Et la liberté de la presse est formellement réaffirmée par le texte du Pacte.
Des centres de rétention interdits ?
Là encore c’est faux. D’abord parce que, comme nous l’avons dit le texte n’est pas contraignant. Ce qu’il dit est sensiblement différent : « Objectif 13 : Ne recourir au placement en rétention administrative des migrants qu’en dernier ressort et chercher des solutions de rechange »
Donner notre siège permanent au Conseil de Sécurité à quelqu’un d’autre ?
Là on est en pleine confusion complotiste. Tout d’abord, on voit mal comment un Pacte sur les Migrations pourrait avoir dans le même temps pour objet de modifier la composition du Conseil de Sécurité.
D’autant que, pour cela, il faudrait carrément modifier la Charte des Nations Unies, qui, dans son Chapitre V consacré au Conseil de Sécurité affirme :
« Article 23
-
Le Conseil de sécurité se compose de quinze Membres de l'Organisation. La République de Chine, la France, l'Union des Républiques socialistes soviétiques, le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord, et les États-Unis d'Amérique sont membres permanents du Conseil de sécurité. »
Ce qui est vrai, en revanche c’est que l ‘Allemagne avait proposé que la France cède son siège de membre à l’Union Européenne. Ce que la France a refusé.
Yaume